Un conducteur sur trois avoue avoir déjà ressenti une peur intense ou une angoisse persistante à l’idée de prendre l’autoroute, selon une enquête menée en 2023. Les troubles du sommeil non diagnostiqués figurent parmi les causes majeures d’accidents sur les grands axes, dépassant parfois l’alcool ou la vitesse.La fatigue chronique, la phobie de la conduite et les micro-endormissements restent largement sous-évalués dans les politiques de prévention routière. Pourtant, des solutions concrètes existent pour identifier ces risques et y faire face, même lorsque l’anxiété semble insurmontable.
Pourquoi l’autoroute peut devenir source d’angoisse ou de somnolence
L’autoroute n’est pas cette simple ligne droite destinée à rejoindre une destination : elle dicte son rythme, impose ses habitudes. La linéarité du paysage, le défilement silencieux des kilomètres, la régularité des limitations, tout contribue à installer une routine où la vigilance s’étiole. C’est le terrain propice au syndrome de l’autoroute. Peu à peu, la somnolence s’infiltre, souvent sous-estimée. Même les conducteurs les plus aguerris ne sont pas à l’abri de cette fatigue qui s’accumule jusque dans les muscles, jusqu’à brouiller le jugement. La somnolence diurne excessive figure aujourd’hui en haut du tableau des causes d’accidents mortels sur les autoroutes du pays.
Physiquement, le corps encaisse aussi l’effet de cette monotonie. L’oreille interne se retrouve en manque de repères dynamiques. Privée de sollicitations, elle perd le nord. Ce résultat invisible se traduit par des vertiges, une sensation de flottement ou de déséquilibre subtil, parfois une perception étrange que beaucoup peinent à formuler. Ceux qui vivent déjà avec des troubles de l’équilibre en font particulièrement les frais ; ce syndrome vestibulaire sur autoroute est davantage qu’une impression fugace.
La baisse de vigilance ne laisse jamais indemne. La fatigue au volant, même mesurée, multiplie les risques. Un moment de somnolence peut faire grimper la probabilité d’accident par huit. Les micro-endormissements surviennent souvent bien avant la sensation réelle de fatigue. Les conducteurs, persuadés d’être encore attentifs, laissent filer les détails autour d’eux, c’est précisément là que l’accident devient inévitable.
Reconnaître les premiers signaux, yeux lourds, tension dans la nuque, bâillements répétés, c’est déjà reprendre pied. Une adaptation immédiate du comportement s’impose : s’accorder une pause, s’arrêter dès les premiers signes, ou envisager un avis médical, c’est refuser de céder du terrain à la fatigue.
Amaxophobie : quand la peur de conduire s’invite sur l’autoroute
L’amaxophobie, autrement dit la phobie de la conduite, n’épargne plus personne. Sur l’autoroute, elle peut surgir sans prévenir, attrapant au détour d’une bretelle un automobiliste pourtant expérimenté. Ce n’est pas la jeunesse du permis qui fait la différence : la peur s’ancre parfois du jour au lendemain, jusque chez ceux qui croyaient en être protégés.
Quand l’anxiété s’empare du volant, les manifestations sont visibles et concrètes. Palpitations, mains soudain moites, bouche sèche, un nœud dans la gorge, et surtout cette impression que tout devient incontrôlable. Il n’est pas rare d’anticiper le trajet avec appréhension, ou de changer tout simplement d’itinéraire pour éviter l’autoroute et ses longues étendues, parfois au profit de petites routes sinueuses.
Les méthodes comportementales ouvrent une voie pour reprendre la main sur la situation. La thérapie cognitive et comportementale (TCC) avance pas à pas : confrontations progressives à l’autoroute, gestion du stress réel lors des premiers kilomètres, apprentissage de la maîtrise des émotions au volant. L’accompagnement d’un professionnel, épaulé par un entourage salarié, donne à chacun la possibilité de retrouver de l’assurance. On ne traverse pas seul ce genre de cheminement.
Les points d’appui de ce travail thérapeutique sont clairs :
- Repérer rapidement les premiers signes d’anxiété au volant
- Prendre l’habitude des exercices de respiration ou de décontraction musculaire
- Identifier et déconstruire les pensées négatives qui s’invitent avant chaque trajet
De plus en plus de centres de formation à la conduite intègrent ces approches, avec des moniteurs spécifiquement formés. L’idée : redonner du contrôle à ceux pour qui la route est devenue étonnamment source d’angoisse, rouvrir le champ des possibilités sans laisser la crainte piloter la voiture à la place du conducteur.
Apnées du sommeil et vigilance : un risque sous-évalué sur les longs trajets
La somnolence diurne excessive due aux apnées du sommeil agit comme une menace trop souvent ignorée sur l’autoroute. Près de deux millions de personnes seraient concernées en France, beaucoup sans même disposer d’un diagnostic ou d’une prise en charge. La fatigue sournoise gagne du terrain, la vigilance décline, les micro-sommeils s’installent, fatalement, les dramatiques accidents mortels se multiplient lors des longs parcours.
Les apnées du sommeil fragmentent les nuits : respiration entrecoupée de pauses, maintien artificiel de l’éveil, réparation impossible pendant le repos. La journée venue, la tête s’engourdit, les réflexes ralentissent, la capacité à percevoir le danger s’amenuise. Beaucoup prennent la route sans savoir qu’ils roulent déjà en mode pilotage automatique.
Des outils existent, comme l’échelle de somnolence développée à Bordeaux, pour mesurer objectivement ses baisses de vigilance au volant. Chez ceux équipés d’une machine à pression positive continue (PPC), l’amélioration est généralement nette, avec un regain d’attention tangible. Dès que la fatigue devient inhabituelle, ou que la lutte contre le sommeil s’installe en plein jour, consulter un spécialiste permet d’interrompre un engrenage dangereux. Identifier et soigner les troubles du sommeil reste le moyen le plus sûr d’éviter les accidents dus à la somnolence sur autoroute.
Des solutions concrètes pour regagner l’assurance au volant
Rééducation, techniques comportementales et innovations numériques
La rééducation vestibulaire, aujourd’hui répandue à Paris comme en province, représente une piste de réponse pour ceux qui souffrent de vertiges ou de troubles de l’équilibre en voiture. Quelques séances suffisent parfois pour réhabituer le corps aux mouvements et permettre à l’esprit de retrouver un cap serein derrière le volant.
Les thérapies cognitivo-comportementales concernent bien sûr tous les conducteurs en proie à l’angoisse ou à l’amaxophobie. Ces protocoles structurés aident à démonter une à une les peurs enracinées et à réapprendre à prendre la route avec plus de distance et de maîtrise émotionnelle. La réalité virtuelle s’invite désormais dans la boîte à outils : elle permet des immersions progressives dans divers scénarios, sous l’œil bienveillant de thérapeutes formés.
Des progrès technologiques voient aussi le jour pour accompagner les automobilistes au quotidien. Plusieurs options utiles sont disponibles :
- Des applications mobiles capables de mesurer l’état de fatigue et de détecter précocement les signaux d’endormissement
- Des systèmes d’alerte embarqués sur les nouveaux modèles de véhicules pour signaler au conducteur une baisse de vigilance
Les organismes œuvrant pour la sécurité routière multiplient les campagnes lors des grands départs et mettent en avant les gestes efficaces : pauses régulières, vigilance face à l’apparition des tout premiers signes de lassitude, réaction rapide dès que la concentration faiblit. Cette capacité d’anticipation construit la meilleure des protections face à l’usure discrète de longs trajets.
Sur chaque portion d’asphalte, la prudence et l’attention active forment la meilleure alliance pour ne pas laisser l’habitude endormir le sens du réel. Pour ceux qui veulent garder intact le plaisir de la route, rester lucide, ce n’est pas négociable : c’est un engagement.


